
Nous avons évoqué il y a peu les supercalculteurs de Météo France. Mais dans les prochaines années, il y en aura de nouveaux. Car après plus de trois années d’études, Météo-France vient de lancer ces jours-ci un appel d’offres pour renouveler les actuels que sont Belenos et Taranis. L’objectif est d’améliorer la fiabilité des prévisions, mieux anticiper les phénomènes à enjeux, simuler plus finement le climat futur et appuyer les actions d’adaptation au changement climatique.
Vers une puissance de calcul 6 fois plus importante d’ici 2029
L’appel d’offres pour le renouvellement des supercalculateurs de Météo-France se déroulera sur toute l’année 2025 pour un premier déploiement en 2027. Le contrat couvrira la période jusqu’en 2033, avec le déploiement d’une puissance de calcul supplémentaire en 2029. À cette date, comparée à leurs performances actuelles, l’objectif est que les supercalculateurs de Météo-France atteignent une capacité de calcul 6 fois plus importante.
À quoi servent les supercalculateurs ?
Les supercalculateurs sont précieux pour les organismes de météo. Ils permettent d’assurer les missions prioritaires de Météo-France : améliorer la qualité et la fiabilité des prévisions, anticiper les phénomènes dangereux (comme les orages, les tempêtes ou les cyclones), et produire des informations pertinentes pour l’adaptation au changement climatique. Leur puissance de calcul (jusqu’à 21 millions de milliards d’opérations par seconde !), 50 000 fois plus importante qu’un ordinateur individuel, permet de traiter et exploiter les données d’observation, nombreuses et précises, notamment grâce aux nouveaux satellites d’observation météorologique européens, indispensables pour initialiser les prévisions et vérifier leur fiabilité ; de calculer l’évolution des variables météorologiques à l’aide des modèles numériques de prévision Arpège (qui couvre l’ensemble du globe) et Arome (modèle déployé des régions d’intérêt, qui couvre des phénomènes à plus petite échelle) ; de simuler les évolutions du climat futur et d’effectuer les recherches nécessaires à l’amélioration des modèles numériques utilisés pour la prévision du temps et les projections climatiques.
Dès lors, ces superordinateurs (parmi les plus puissants au monde) sont essentiels au travail des équipes de Météo-France, car ils permettent de développer et exécuter les codes informatiques utilisés pour modéliser les phénomènes météo à l’échelle mondiale ainsi que sur les territoires français, en simuler l’évolution à toutes échéances et ainsi mieux anticiper les impacts et les risques pour les populations. Ils aident également à comprendre les changements du climat et leurs conséquences, et ainsi appuyer les actions d’adaptation.
L’IA dans les nouvelles architectures de calculs.
L’appel d’offre émis par Météo-France s’inscrit dans une période d’évolution majeure des outils scientifiques et techniques mobilisés pour la prévision météorologique et la modélisation climatique.
Les futurs supercalculateurs intégreront ainsi de nouvelles architectures de calcul permettant d’augmenter leur performance tout en accroissant leur efficacité énergétique. Ils rendront également possible la coexistence de systèmes de prévision à base physique (notamment modèles AROME et ARPEGE) avec de nouvelles approches fondées sur l’usage de l’intelligence artificielle, dans lesquelles les équipes de Météo-France sont déjà fortement engagées.
Les prévisions seront encore plus précises
Météo-France développe et exploite deux modèles complémentaires de prévision numérique du temps : Arpège (le modèle planétaire) et Arome (le modèle régional). Ces modèles travaillent en découpant l’atmosphère en petites unités, que l’on appelle des « mailles ».
Les nouveaux supercalculateurs permettront de réduire encore la résolution des prévisions, et donc la précision des prévisions, avec des « mailles » plus fines, en représentant mieux les phénomènes atmosphériques et leurs interactions avec les surfaces continentales et océaniques, et en utilisant des observations plus nombreuses pour mieux initialiser les prévisions.
Météo France attend de nombreuses améliorations opérationnelles d’ici à 2033 avec ce renouvellement des supercalculateurs. Cela passera notamment par l’augmentation du nombre de Vigilances orange ou rouge anticipées avec un préavis d’au moins six heures; une qualité de la prévision des précipitations et des rafales améliorées d’environ 10 % ; en Outre-mer, une prévision plus fiable de l’intensité (probable, maximale) des cyclones tropicaux et de meilleures prévisions des évènements de pluie intense et crues qui affectent régulièrement ces territoires ; pour le secteur aérien: un saut significatif dans la qualité des prévisions aux échéances de la prévision immédiate (c’est-à-dire jusqu’à six heures d’échéance), pour optimiser la gestion du trafic aérien ainsi que les décisions « courantes » de gestion des aéroports ; et enfin pour le climat et les simulations climatiques, une estimation plus précise de l’évolution de la fréquence et la sévérité des évènements extrêmes.
Bref, tout cela ne devrait donc qu’apporter du positif pour mieux anticiper les violents évènements qui on le sait pourraient s’amplifier avec le réchauffement climatique.
Il n’y a bien sûr pas que la France qui possède des supercalculteurs. On peut citer notamment l’organisme national allemand, DWD avec son SX-Aurora Tsubasa dont nous aurons l’occasion de reparler prochainement. On peut envisager que les autres pays amélioreront encore leurs matériels de prévisions.